Pour le voyageur en Patagonie (j'en reviens), les lieux ont des noms anglais qui évoquent notamment les navigateurs et découvreurs d'il y a à peine deux siècles arrivés ici en voiliers.
Forcément, ça donne envie d'aller rechercher (du moins c'est mon cas) l'histoire de ces sortes de héros; et de découvrir de drôles d'histoires.
Ces pionniers sont un peu comme des entrepreneurs face à l'inconnu, il y a des bons moments, des joies, et aussi des découragements, et même des drames.
Je découvre ainsi l'histoire du HMS Beagle, qui donne son nom au Canal Beagle (il sera ainsi nommé lors de de l'expédition du Beagle), que l'on parcourt aujourd'hui en bateau de croisière. Et notamment le destin des capitaines Stokes et FitzRoy.
Le premier voyage part de Plymouth le 22 mai 1826, sous le commandement du capitaine Pringle Stokes. L'expédition va découvrir les difficultés de la navigation en Terre de Feu dans le détroit de Magellan. Le paysage est immense et monotone. En juin 1828, le Beagle arrive à Port Famine (c'est le nom que lui a donné le navigateur Cavendish, qui y découvre les rares survivants d'une expédition de colonisation précédente).
Le capitaine Strokes lors de cette arrivée à port Famine, note dans son journal :
" Rien ne pourrait être plus triste que le paysage autour de nous".
Devant le paysage, il se met à déprimer. C'est ainsi que le 1er août le capitaine Strokes prend un pistolet dans sa cabine, le porte à sa tête, et tire. Le coup n'est pas fatal, mais le médecin ne parviendra pas à le sauver; il meurt le 12 août 1828.
Le capitaine qui lui succède est Robert FitzRoy, jeune aristocrate de 23 ans, qui entreprend le deuxième voyage du Beagle, du 27 décembre 1831 au 2 octobre 1836. Pour ce deuxième voyage, le capitaine FitzRoy, par peur de déprimer lui aussi comme le capitaine Strokes, cherche un compagnon de voyage avec un niveau intellectuel suffisant pour qu'il puisse discuter avec lui. C'est ainsi qu'il embarque avec un jeune étudiant en théologie et naturaliste, Charles Darwin. Il décrira la faune et la flore, et les personnes rencontrées, dans son livre sur ce voyage. Et il en tirera ensuite son analyse sur "l'origine des espèces".
Après son retour de cette expédition, le capitaine FitzRoy, cinq ans après, ce capitaine qui avait été embauché comme capitaine suite au suicide du capitaine, va lui aussi être victime de dépression. Le dimanche 30 avril 1865 il entre dans son dressing juste avant huit heures, prend un rasoir, et se tranche la gorge.
Drôles d'aventures; on croirait le livret d'un opéra, une tragédie, ou un drame shakespearien.
Ces histoires rendent encore plus captivante la traversée de ces lieux, presque deux cents ans après.
NOTA : Je trouve toutes ces histoires dans le livre de Chris Moss – " Patagonia, a cultural history".

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